« Je veux tuer des gens » : quand les idéologies djihadiste et nazie captent la souffrance et la haine d’adolescents en perdition

Roter.Teufel

Sub-Administrador
Team GForum
Entrou
Out 5, 2021
Mensagens
23,241
Gostos Recebidos
946
« Je veux tuer des gens » : quand les idéologies djihadiste et nazie captent la souffrance et la haine d’adolescents en perdition

fd3008d_1699313199262-2023-11-06-aurel-enfants-terro.jpg


EnquêteAgés de 16 ans à 19 ans, trois hommes et une femme, fascinés par la violence djihadiste et d’ultradroite, échangeaient sur Internet et projetaient des attentats pour prendre leur « revanche sur l’humanité ». Le Parquet national antiterroriste demande qu’ils soient jugés pour « association de malfaiteurs terroriste ».

Ce sont des jeunes à la dérive. Ils ont été victimes de harcèlement scolaire, d’agressions sexuelles ou de leur propre délire de persécution. Ils se sont isolés, réfugiés dans leur chambre et se sont branchés sur Internet. Ils se sont fait des « amis » en ligne, leurs seuls amis, sur des forums consacrés aux tueries scolaires, à l’idéologie nazie ou à la propagande djihadiste. Ils ont partagé des vidéos de décapitations, des photos de tueries de masse qui ont résonné avec leur fascination pour la mort et la violence. Ils veulent « couper des têtes », « massacrer des gens ». Ils se disent racistes ou djihadistes, ils partagent une haine inextinguible contre l’humanité, une colère que rien n’étanche, contre leurs harceleurs, leurs agresseurs, les musulmans, les juifs, les Noirs, les femmes, les autres.

Ils ont discuté entre eux de projets d’attentat. Ils ont fantasmé de tuer des « mécréants » ou des « Nègres ». Ils ont fabriqué des explosifs et tourné des vidéos de revendication dans l’espoir que leur rage éclate aux yeux du monde, qu’on parle d’eux, qu’on se souvienne de leur « œuvre » après leur mort. Ils ont entre 16 et 19 ans. Ce sont encore des enfants. Des enfants malheureux et dangereux.

Cette enquête de la justice antiterroriste avait commencé comme tant d’autres, par un renseignement faisant état d’un projet d’attentat imminent. Mais lorsqu’ils ont fait irruption dans la chambre de Louna (tous les prénoms ont été modifiés), qui venait d’avoir 18 ans, les policiers ont vite compris que le logiciel antiterroriste classique ne suffirait pas à saisir toutes les nuances de cette affaire. Car si Louna est fascinée par l’organisation Etat islamique (EI), elle nourrit aussi un vif intérêt pour le nazisme. Sur Internet, elle discute d’ailleurs de ses projets d’attentat avec trois garçons qui ne partagent pas tous les mêmes convictions : l’un, brillant étudiant franco-japonais de 17 ans, rêve de partir en Syrie, les deux autres, âgés de 16 et 19 ans, sont fascinés par Adolf Hitler et projettent une tuerie dans un lycée ou une mosquée.

Ce dossier, point de rencontre entre des idéologies qui n’ont a priori rien à voir entre elles, a longtemps embarrassé la justice antiterroriste. Comment qualifier le mobile de suspects qui s’associent dans leurs projets mais que tout semble opposer sur le plan des idées ? Parce qu’elle dévoile l’intime derrière le politique, la pulsion sous le discours, cette enquête est une invitation à penser la façon dont les idéologies radicales captent les désordres psychiques de jeunes gens en perdition. Au terme de deux ans et demi d’instruction, le Parquet national antiterroriste a demandé, dans un réquisitoire définitif daté du 2 octobre et dont Le Monde a pris connaissance, que ces quatre adolescents soient jugés pour « association de malfaiteurs terroriste ».

Le Monde
 
Topo