Au tribunal de Créteil, la pharmacienne et les 96 fausses ordonnances

Roter.Teufel

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Au tribunal de Créteil, la pharmacienne et les 96 fausses ordonnances

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Cendrine C. était jugée, lundi, pour une escroquerie de plus d’un million d’euros au préjudice de l’Assurance-maladie. Elle affirme avoir agi sous la contrainte d’un mari violent.

« Je jure d’exercer ma profession avec conscience et de respecter non seulement la législation en vigueur, mais aussi les règles de l’honneur, de la probité et du désintéressement. » Pour avoir trahi la promesse du serment de Galien – équivalent chez les pharmaciens de celui d’Hippocrate – qu’elle avait prêté en 2001, Cendrine C. se retrouvait, lundi 12 juin, devant le tribunal correctionnel de Créteil, amené à juger un cas emblématique de la fraude sociale à laquelle le gouvernement a récemment annoncé vouloir faire la chasse.

Entre 2014 et 2018, depuis son officine située à deux pas du château de Vincennes (Val-de-Marne), cette pharmacienne de 50 ans a réussi à se faire rembourser 96 fois par l’Assurance-maladie un médicament qu’elle n’avait pourtant vendu à personne. Et pas n’importe quel médicament : l’Ilaris, prescrit contre les problèmes d’arthrite très lourds, dont chaque boîte coûte près de 12 000 euros, remboursés à 100 %. Montant du préjudice : 1 161 921 euros.

Cendrine C. se contentait de transmettre encore et encore à l’Assurance-maladie les quatre mêmes ordonnances – bien réelles, mais à usage unique en théorie – en changeant simplement la date à chaque fois. « C’était assez grossier », soupire l’avocate de l’organisme. Dans un système déclaratif qui repose sur la confiance entre les professionnels de santé et l’Assurance-maladie, celle-ci reçoit des milliers et des milliers d’ordonnances par jour, procède aux remboursements, et n’enquête qu’après-coup, lorsqu’un cas lui semble suspect, comme le fut celui de cette pharmacienne.

« Déshonneur »

Il n’a pas été bien difficile d’établir que les médecins dont le nom figurait sur l’en-tête des ordonnances ne les avaient jamais renouvelées eux-mêmes, que les deux assurés concernés par lesdites ordonnances se procuraient depuis longtemps leurs boîtes d’Ilaris ailleurs, et que Novartis, seul laboratoire fabriquant ce médicament, n’avait reçu aucune commande de la pharmacie incriminée entre 2014 et 2018.

La prévenue, contrite et tout de noir vêtue à la barre, a reconnu avoir falsifié et envoyé les ordonnances, mais a affirmé avoir agi sous « la contrainte » d’un mari violent souhaitant mener grand train « sur le dos de la pharmacie » et qui leur faisait vivre, à leurs quatre enfants et elle, « un enfer » – une procédure de divorce est en cours.

L’argument n’a pas ému l’avocat de l’ordre des pharmaciens, qui lui a reproché d’avoir « déshonoré » la profession et d’avoir, en escroquant la Sécurité sociale – « c’est-à-dire la société entière » – abîmé « un des fondements du système qui nous permet à tous d’avoir des médicaments gratuitement ».

Le Monde
 
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