Aux origines du fonds Marianne, les errances d’une unité de « contre-discours » d’Etat

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Aux origines du fonds Marianne, les errances d’une unité de « contre-discours » d’Etat

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Recrues sans expertise du djihadisme, attaques en ligne ad personam... Avant de lancer le fonds Marianne aujourd’hui controversé, le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation avait créé une discrète unité de contre-discours républicain, dont les pratiques et l’efficacité posent aussi question.

Créé en avril 2021 par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée chargée de la citoyenneté, pour lutter contre le séparatisme, le fonds Marianne a fait grand bruit. Cette manne financière de 2,5 millions d’euros, destinée à financer des actions associatives de prévention de la radicalisation, fait l’objet d’une information judiciaire ouverte par le Parquet national financier pour des soupçons de détournement de fonds publics ainsi que d’une enquête administrative et d’une commission d’enquête sénatoriale. L’agressivité manifestée par certaines associations financées par ce fonds pour fustiger des personnes accusées d’être « complices de l’islamisme » a également fait scandale.

Une autre organisation, fondée à la même période et poursuivant des buts similaires, est restée jusqu’ici méconnue : la très discrète unité de contre-discours républicain (UCDR), pilotée elle aussi par le préfet Christian Gravel, secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). Elle pose pourtant des questions tout aussi importantes sur les limites de la « contre-propagande » de l’Etat face à la radicalisation. Depuis sa création, fin 2020, elle aussi dans la foulée de l’assassinat terroriste du professeur Samuel Paty, rien ou presque n’a filtré sur le travail accompli par cette équipe chargée, au nom du gouvernement, de « riposter aux acteurs extrémistes, séparatistes ou complotistes » et de « promouvoir les valeurs républicaines » sur les réseaux sociaux.

Le Monde a enquêté sur le fonctionnement et les opacités de l’UCDR, sa connivence avec les mouvances laïcistes proches du Printemps républicain, ses recrues sans expertise du djihadisme, sa pratique de riposte ciblée et d’attaques ad personam en ligne. Signe d’un climat délétère, l’immense majorité de la douzaine d’interlocuteurs interrogés, membres actuels et anciens de l’équipe, ou familiers de ces structures, n’a accepté de répondre qu’en échange de la promesse du respect de l’anonymat, tant ils craignaient les conséquences d’une critique formulée à visage découvert contre cette agence de contre-propagande d’Etat.

Dénoncer les « complices de l’islamisme » ?

Une semaine après l’assassinat de Samuel Paty, Marlène Schiappa annonce, le 23 octobre 2020, la création d’« une unité de contre-discours républicain sur les réseaux sociaux (…) pour ne plus laisser l’espace à ceux qui endoctrinent ». Une initiative qui rappelle Stop Djihadisme, un service lancé en 2015 sous l’égide du service d’information du gouvernement, alors dirigé par Christian Gravel, un proche du premier ministre d’alors Manuel Valls, qui l’a nommé préfet la même année. M. Gravel, qui a préféré répondre à nos questions par l’intermédiaire de son équipe de communication, est le tenant d’une ligne dure en matière de laïcité et de réponse à l’islam radical, ligne qui épouse celle d’autres fidèles du premier ministre socialiste, que l’on retrouve nombreux au sein du mouvement prolaïque du Printemps républicain, créé la même année.

Le Monde
 
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