Le permis de conduire, plébiscité dans les campagnes, délaissé en ville, symbole de fractures territoriales et sociales

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Le permis de conduire, plébiscité dans les campagnes, délaissé en ville, symbole de fractures territoriales et sociales

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Par Robin Richardot (Garges-lès-Gonesses (Val-d’Oise), Lyon, Vinzieux (Ardèche), envoyé spécial)

ReportageLe gouvernement a annoncé un abaissement à 17 ans de l’âge minimum nécessaire pour l’obtention de ce précieux sésame à partir de janvier 2024. Une mesure attendue avec plus ou moins d’impatience selon les territoires. Un même constat unit en revanche les jeunes : le coût du permis est jugé trop élevé.

On n’est peut-être pas sérieux à 17 ans, mais on pourra bientôt passer son permis de conduire. Mercredi 21 juin, à Matignon, la première ministre, Elisabeth Borne, a confirmé que le gouvernement allait abaisser l’âge minimum pour le permis dès le 1er janvier 2024. Une mesure destinée notamment aux jeunes en apprentissage. Elle en ravira bien d’autres, puisque 86 % des 18-26 ans le jugent indispensable, selon une étude de l’Institut Montaigne, publiée en mai 2022.

Pour autant, le précieux sésame est plus important pour les populations éloignées des métropoles et des centres-villes. Les chiffres des rapports de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) révèlent une fracture territoriale et sociale sur les questions de mobilité en France : 85 % des jeunes de 18-24 ans résidant en milieu rural avaient le permis en 2019, contre 41 % en agglomération parisienne. En 2014, ils étaient 77 % dans la première catégorie et 50 % dans la seconde.

A Vinzieux, commune de 450 habitants en Ardèche, les distances se calculent en « minutes en voiture ». Là-bas, l’automobile est reine et Elisa Ribeiro l’a bien compris. Cette lycéenne a passé et obtenu son permis le 5 juin, à 18 ans, après avoir enchaîné les heures de conduite accompagnée. « C’est un passage obligé, on ne se pose même pas la question. Il me le faut pour être indépendante, aller où je veux », témoigne-t-elle.

« Gouffre financier »

A son côté, Emmy Berne, 17 ans et 2 100 kilomètres de conduite accompagnée à son actif depuis décembre 2022, attend avec impatience de souffler ses dix-huit bougies, en mai 2024. Elle aimerait déjà pouvoir conduire seule, pour éviter à ses parents de « faire le taxi », mais aussi pour ne pas passer son examen en même temps que le bac, l’année prochaine.

Ce serait un euphémisme de dire que les transports en commun sont rares ici. Seul le car scolaire passe le matin et le soir (et uniquement en période scolaire). Pour rejoindre Annonay, la ville la plus proche, il faut compter une heure de marche puis quinze minutes de bus. En voiture, vingt minutes suffisent.

Le maire de Vinzieux, Hugo Biolley, peut témoigner que la question de la mobilité est la première préoccupation des jeunes dans sa commune. Il le peut d’autant plus que, à 22 ans, il est le plus jeune édile de France et le premier concerné. L’étudiant à Sciences Po Grenoble, possesseur de la carte rose dès 17 ans et demi, mais qui a dû attendre ses 18 ans pour prendre le volant tout seul, parcourt en moyenne 10 000 kilomètres tous les trois mois depuis son début de mandat. Déplorant les frais d’essence et d’entretien qui vont avec. « La voiture nous permet de nous émanciper, nous donne accès à la formation et à l’emploi et, en même temps, c’est un gouffre financier et écologique, créateur d’inégalités », regrette l’élu.

Le Monde
 
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